Un arrêt du 27 février 2016 rendu par la chambre criminelle de la Cour de Cassation (N° pourvoi 15-80.581), est venu confirmer la position retenue depuis longtemps par la Chambre suprême pour ce qui concerne une infraction de non-respect des distances entre les véhicules mais qui s’applique tout aussi bien à l’infraction d’excès de vitesse.
C’est ainsi que cet arrêt vient souligner que le procès- verbal de contravention ne précisait pas les circonstances concrètes dans lesquelles l’infraction avait été relevée. Le Juge ne peut ainsi déclarer un prévenu coupable d’une infraction sans en avoir caractérisé tous les éléments constitutifs.
La décision est ainsi rédigée :
« Vu le mémoire personnel produit ;
Sur le premier moyen de cassation, pris de la violation des articles 537 du code de procédure pénale, R.412-12 du code de la route ;
Vu l’article 593 du code de procédure pénale, ensemble l’article R. 412-12 du code de la route ;
Attendu que le juge répressif ne peut déclarer un prévenu coupable d’une infraction sans en avoir caractérisé tous les éléments constitutifs ;
Attendu que, pour déclarer M. X… coupable de conduite d’un véhicule sans avoir respecté les distances de sécurité, le jugement attaqué énonce que « le procès-verbal de contravention, qui se borne à mentionner la qualification de l’infraction sans autre précision sur d’éventuelles circonstances concrètes ne contredit pas les dispositions de l’article 537 du code de procédure pénale »;
Mais attendu qu’en prononçant ainsi, alors que le procès-verbal de contravention, qui ne précisait pas les circonstances concrètes dans lesquelles l’infraction avait été relevée, de nature à établir que la distance de sécurité avec le véhicule qui le précédait n’avait pas été respectée par M. X…, ne comportait pas de constatations au sens de l’article 537 du code de procédure pénale, la juridiction de proximité n’a pas justifié sa décision ;
D’où il suit que la cassation est encourue ;
Par ces motifs, et sans qu’il soit besoin d’examiner le second moyen de cassation proposé :
CASSE et ANNULE, en toutes ses dispositions, le jugement susvisé de la juridiction de proximité de Paris, en date du 2 décembre 2014, et pour qu’il soit à nouveau jugé, conformément à la loi ;
RENVOIE la cause et les parties devant la juridiction de proximité de Paris, autrement composée, à ce désignée par délibération spéciale prise en chambre du conseil ;
ORDONNE l’impression du présent arrêt, sa transcription sur les registres du greffe de la juridiction de proximité de Paris et sa mention en marge ou à la suite du jugement annulé.. »
Dans le même sens et appliqué à l’infraction d’excès de vitesse, une jurisprudence récente est venue clarifier la nécessité pour les Tribunaux ainsi que pour les services de police interpellateurs, de bien caractériser les circonstances permettant de dire que la vitesse était excessive :
Cour de Cassation, chambre criminelle, 6 janvier 2015 n° 14-81271 :
« La COUR, statuant après débats en l’audience publique du 25 novembre 2014 où étaient présents dans la formation prévue à l’article 567-1- 1 du code de procédure pénale : M. Guérin, président et
conseiller rapporteur, MM. Beauvais et Straehli, conseillers de la chambre ;
Greffier de chambre : Mme Leprey ;
Sur le rapport de M. le conseiller GUÉRIN et les conclusions de Mme l’avocat général LE DIMNA ;
Vu le mémoire personnel et les observations complémentaires produits ;
Sur le premier moyen de cassation, pris de la violation de l’article 429 du code de procédure pénale ;
Attendu que, pour rejeter l’exception de nullité du procès-verbal constatant l’infraction susvisée, le jugement attaqué retient que le procès-verbal est signé et que son auteur peut être identifié par son nom et son numéro de matricule ;
Attendu qu’en l’état de ces énonciations, dont il résulte que le procès-verbal était régulier au regard des prescriptions de l’article 429 du code de procédure pénale, la juridiction de proximité a justifié sa décision ;
D’où il suit que le moyen doit être écarté ;
Mais sur le second moyen de cassation, pris de la violation des articles 537 et 593 du code de procédure pénale ;
Vu l’article 593 du code de procédure pénale ;
Attendu que, tout jugement ou arrêt doit comporter les motifs propres à justifier la décision ; que l’insuffisance ou la contradiction des motifs équivaut à leur absence ;
Attendu que, pour dire établie la contravention de conduite d’un véhicule à une vitesse excessive eu égard aux circonstances, le jugement énonce qu’il résulte des débats de l’audience et des pièces versées à la procédure que la prévenue a bien commis les faits qui lui sont reprochés ;
Mais attendu qu’en se déterminant ainsi, sans mieux caractériser les circonstances permettant de dire que la vitesse était excessive, la juridiction de proximité n’a pas justifié sa décision ;
D’où il suit que la cassation est encourue de ce chef ;
Par ces motifs :
CASSE et ANNULE, en toutes ses dispositions, le jugement susvisé de la juridiction de proximité de Lorient, en date du 14 janvier 2014, et pour qu’il soit à nouveau jugé, conformément à la loi,
RENVOIE la cause et les parties devant la juridiction de proximité de Vannes, à ce désignée par délibération spéciale prise en chambre du conseil ;
ORDONNE l’impression du présent jugement, sa transcription sur les registres du greffe de la juridiction de proximité de Lorient et sa mention en marge ou à la suite du jugement annulé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre criminelle, et prononcé par le président le six janvier deux mille quinze ;
En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre ».